En 2024, Twint est devenue incontournable. Elle apparaît dans les médias comme une petite startup crée par une bande de copains, et qui s’est imposée comme la plateforme de paiement sans contact la plus populaire de Suisse. Son patron, Markus Kilb est également présenté comme une sorte d’entrepreneur ambitieux qui veut conquérir le monde avec son application. En vérité, Kilb n’est qu’un hologramme à la tête d’une société qui n’est rien, et tout à la fois. Vous comprendrez plus bas. Voici un rapide résumé de son histoire, un survol de sa structure et surtout la présentation de quelques personnages clés, afin de mieux comprendre à quoi correspond cette application. Et vous verrez, à la fin on aura droit à un petit Twint… pardon un twist.

Création et ascension de l’entreprise
Selon le site de Twint, la création date de septembre 2016.³ En fait, l’entreprise fut crée en 2014 sous l’impulsion de Postfinance. Elle s’appelait d’abord Monexio et empruntant la technologie d’une entreprise genevoise appelée Mobino à Genève.^1,2. Son patron [de l’époque] Thierry Kneissler vient également de chez Postfinance. Puis en 2016⁶, Twint fusionne avec SIX Payment Services une filiale de SIX Group⁴. Dans son rapport annuel de 2016⁵, on comprend que c’est bien SIX Group qui a conclu un accord avec six banques suisses et Postfinance (voir encadré) Dans cet article de mobeyforum.org, Twint à son lancement en 2016 est décrit comme un "consortium bancaire". Ce qui contraste avec l’image de la petite startup.

Alors à qui appartient Twint ?
Twint est donc un consortium entre Postfinance, SIX Group et les banques. Et comme mentionné ci-dessus, le groupe Worldline ayant racheté une branche de SIX Group, il a naturellement aqui une partie de Twint, à savoir 20% comme mentionné dans cet accord. Malgré l’absence de rapport d’activité, j’ai trouvé sur le camembert des parts sur le site Finews¹³. Postfinance et SIX Group : 26.5% chacun. Les banques : 26%. Worldline : 20%.

Depuis sa création, le succès de l’application n’a cessé de croître avec une facilité déconcertante, avec un saut quantitatif durant la période "covidesque". Nul besoin d’expliquer pourquoi. Le nombre de convertis a déjà atteint, au moment ou j’écris cet article, une masse critique⁹ et il est certain que ce mode de paiement s’est déjà imposé. Plutôt que de statistiques, je me suis intéressé à la structure interne de l’entreprise et ceux qui la compose, car les personnes et leur parcours ont souvent plus à raconter que les chiffres. Je me suis d’abord penché sur le patron, Markus Kilb, et le reste de la direction qu’on trouve sur le site. Puis je me suis intéressé au conseil d’administration qui est curieusement pas mentionné clairement sur le site. L’entreprise ne publie pas non plus de rapport annuel¹⁰. Sur le site il y a des communiqués de presses dans lesquels on trouve un nom ici et la mais pas de liste claire. Heureusement on trouve les noms sur les sites type Business Monitor ou Linkedin, etc…

Markus Kilb, et la direction
Markus Kilb est le personnage le plus médiatisé. Citoyen Allemand, il est le CEO de Twint depuis avril 2019. Il tient le rôle du jeune patron ambitieux, paradant dans les médias pour venter la philosophie soit disant innovante de sa société. Sa meilleure punchline date du 28 janvier 2019 pour Finews.com. Traduit de l’anglais, je cite « De nombreux jeunes préféreraient probablement se couper la main plutôt que de laisser leur téléphone à la maison. »¹¹ Voilà ce que pense le patron de Twint de ses millions d’utilisateurs. Heureusement, ceux-ci sont bien assez c**s pour lui donner raison. Les autres membres de la direction ont des profils similaires mais rien de vraiment édifiant dans leurs parcours. On trouve encore la une direction "jeune et dynamique" qui colle avec l’image de la startup. Notons tout de même Jens Holger Plath qui a été directeur de la section P2P de Paypal Allemagne Autriche Suisse entre 2016 et 2018.

Le conseil d’administration
Lorsqu’on lit les noms du conseil d’administration, on remarque déjà qu’il est présidé par un Danois. Un certain Søren Mose qui a été président de la branche Suisse de la Saxo Bank, qui lui est concitoyenne, entre 2007 et 2014. On le retrouve dans plusieurs communiqués de presse de Twint s’exprimer en son nom de la stratégie de l’entreprise. Il est à ce poste depuis 2018 et en est apparemment à son 3^ème mandat. Puis il y a le Français Marc-Henri Desportes vivant à Versailles qui n’est autre que le directeur adjoint du groupe français Worldline cité plus haut. Ces deux personnages sont certainement les plus importants du comité mais nous y reviendrons. Puis les autres membres, tous Suisses représentent les différentes banques :

• Sandra Lienhart ancienne directrice de la Banque Cler
• Roland Altwegg membre de la direction de Raiffeisen¹⁶
• Andreas Kubli responsable de la numérisation chez UBS¹⁷
• Hans Martin Graf, Managing Director, Head of Corporate Products and Operations IT at Credit Suisse
• Daniel Previdoli, Head of Products, Services & Direct Banking | Member of the Executive Board at Zürcher Kantonalbank (ZKB)
• Jose F. Sierdo Membre de la Direction générale de la BCV et Directeur général de la Division Retail.

Marc-Henri Desportes et Worldline
Issu de l’"élite" parisienne il a fait Polytechnique et les Mines Paris¹² d’ou il sort diplômé en 1994. Puis il occupe dès son jeune âge et sans transition des postes importants. Par exemple son premier mandat est directeur adjoint du programme de numérisation de l’administration fiscale française. Puis BNP Paribas, puis Atos. Actuellement, il est directeur adjoint de Worldline, membre du conseil d’administration de France TV et membre du conseil d’administration de Twint. Son idéal est une société sans cash et son moteur est la nécessité d’être toujours à l’affût des nouvelles avancées technologiques en matière de paiement sans contact afin que Worldline ne perde pas sa place de Leader européen.^14,27 En tant que VRP, de Worldline, il milite également pour le Digital Identity Wallet¹⁵
Worldline est au coeur de la tyrannie numérique en construction dans l’union européenne, qu’ils appellent Digital Europe. Notamment dans les technologies liées à la sécurité des paiements numériques. En outre, il faut comprendre que le sujet des solutions de paiement numérique n’est qu’une des facettes de la société digitale. L’identité numérique, la biométrie, la cyber sécurité, l’intelligence artificielle, le droit numérique, la blockchain, etc… sont autant d’autres enjeux que la technocratie européenne peine à gérer dans son ensemble et à définir de manière cohérente. Et justement, Worldline travaille également sur le digital Wallet ou portefeuille numérique, une sorte de portefeuille qui regroupe tous vos moyens de paiements. Mais ce n’est pas tout, ils travaillent également sur un portfolio d’identité²⁸ qui regroupe vos données biométrique et qui vous permettra de vous identifier pour divers services et bien sûr, pour vos paiements. Génial non ? Et quand tous les aspect serons sous contrôle, on pourra aussi vous diminuer votre salaire si vous avez regardé une vidéo "complotiste", ou vous empêcher d’acheter de la nourriture trop grasse. Pour votre santé bien sûr. Bref, le meilleur des monde, et cela, peut être avec la contribution de Worldline.
Le sujet de la société digitale est une pelote infinie, qu’on ne va pas dérouler, mais cela montre à quel point Twint est imbriqué dans une infrastructure qui sors complètement du cadre de la Suisse. Notre pays ne peut qu’être dépassé et débordé par ces enjeux et contraint de suivre la masse qui l’entoure. Et tout ceci se fera sans la moindre validation démocratique.
Pour visualiser l’imbrication de Worldline dans le système de paiement européen, je vous laisse consulter ce document²⁵. Notamment la page 77.

Søren Mose, l’EMPSA et Blackrock
Søren Mose est le président du conseil d’administration de Twint et le représentant de SIX Group (duquel il est aussi du conseil d’administration, le Danois cité plus haut, c’est lui) sachant cela et sachant que SIX Group est co-majoritaire avec Postfinance, on peut dire qu’il est probablement le personnage le plus important chez Twint³⁰. Et son CV ne s’arrête pas là. Au détour d’un communiqué de presse sur le site de l’application, on apprend que le Danois est également président d’une "association" appelé l’EMPSA (European Mobile Payment Systems Association). Elle regroupe des solutions de paiement de 11 pays européens²¹. L’EMPSA est en fait une initiative de Twint²⁹ et d’ailleurs son quartier général est à la même adresse à Zürich. L’ambition de Søren Mose et de l’EPMSA est de contribuer activement à la mise en place d’un réseau de paiement numérique au niveau européen. L’association a un certaine influence puisque leur initiative est citée dans des documents de la commission Européenne^22,23. Cela nous permet de mieux comprendre pourquoi Markus Kilb²⁴ prédit de conquérir le monde avec son application²⁰. Pour parvenir à ses fins, l’EMPSA devra lutter contres d’autres sociétés du même type qui visent le même but, donc c’est loin d’être gagné. Et si monsieur Mose est si sûr de lui, c’est peut être parce qu’il représente un groupe bien connu qui pèse lourd dans la finance internationale, à savoir Blackrock. Le danois est en effet au conseil d’administration de Blackrock Suisse et représentant des ishares du même groupe. En d’autres termes, Twint est pilotée directement par Blackrock¹⁸

Une interview de Larry Fink, le CEO de Blackrock faite sur pme.ch²⁶ peut nous éclairer sur les raisons pour lesquelles on retrouve ce géant aux commandes de Twint. Et voici comment on pourrait résumer cet article :
Les états s’endettent à cause du Covid et à la guerre en Ukraine, mais aussi pour subventionner la transition énergétique ( dans laquelle Blackrock investit ). Toutes ces crises, que bien sûr Blackrock ne contribue pas à alimenter, créent de la dette et une forte recession. Les gens perdent donc confiance en les banques centrales et les systèmes monétaires traditionnels, gérés par les états. Les populations, par défiance se tournent de plus en plus vers les cryptomonnaies dont le Bitcoin et c’est pourquoi Blackrock investit très sérieusement dans la Coinbase et les nouveaux moyens de paiements, ainsi que dans la recherches de nouvelles technologies de production énergétique.

Voici juste quelques extraits de cet interview de Larry Fink. Navré, c’est un peu indigeste mais c’est important à comprendre ce qu’il a derrière la tête.

Il doit y avoir un plan global à long terme et une approche progressive si l’on veut que ce soit fait de manière juste et équitable. La seule façon d’agir de manière juste et équitable en Europe est que les gouvernements subventionnent les coûts de l’énergie.
[…]
Depuis lors, nous avons étudié les monnaies numériques de manière approfondie, ainsi que leur rôle dans la société. Je suis fermement convaincu que nous devons révolutionner les paiements dans le monde. Le coût des paiements est beaucoup trop élevé.
[…]
Pourquoi investir dans un instrument vieux de 30 ans si l’on ne croit pas que l’humanité se portera mieux à l’avenir? Le bitcoin est ce que j’appellerais un or numérique. Comme l’or, c’est une classe d’actifs d’incertitude. Si l’on ne croit pas au système – quoi que l’on entende par là – et si l’on ne croit pas à l’impression de monnaie et aux politiques monétaires excessives et si l’on a peur de l’atmosphère politique d’un pays, quel qu’il soit, je pense que le bitcoin joue en ce moment le rôle que l’or jouait auparavant.
[…]
Je pense qu’un euro ou un dollar numérique auront un rôle à jouer. Mais la grande question est de savoir quel rôle le système bancaire peut encore jouer si l’on numérise l’argent. Il y a beaucoup de grandes questions à résoudre. Mais la technologie de la numérisation des monnaies est très importante. De plus en plus de clients nous demandent également ce qu’ils doivent faire.
[…]
Nous avons décidé d’investir dans de telles entreprises afin de mieux les comprendre. Nous avons une équipe qui se penche sur le rôle que nous pouvons jouer. Nous avons par exemple investi dans une entreprise appelée Circle, l’une des entreprises de stablecoin à la croissance la plus rapide aux Etats-Unis. Et nous gérons les garanties dans cette activité sans prendre de risque de crédit.
[…]
Nulle part dans le monde la situation n’est aussi bonne qu’il y a un ou deux ans d’un point de vue économique. Il y a d’autres questions: à quoi ressemblent les Etats-Unis après les élections? Quelle sera la situation en Chine après le congrès du parti? Quelles seront les circonstances en Europe? Pour l’Europe, il sera important de s’affranchir de la dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie.

Larry Fink pour pme.ch

Conclusion
Lorsque vous demandez à un adepte de Twint pourquoi, il l’utilise, il vous répondra certainement : « Parce que c’est simple et pratique ! » Et c’est exactement ce que font les grands groupes privés qui sont en train de prendre le pouvoir : ils contribuent à façonner un monde extrêmement complexe et changeant ou règne l’incertitude, une vie cher, un besoin de sécurité (pour se protéger par exemple des méchants hackers russes), etc… Heureusement, ces technocrates conçoivent aussi les outils pour vous aider qui sont toujours vendus comme une solution pour vous simplifier la vie. Que cette solution soit vendue à un individu, à une entreprise ou à un état, c’est la même rhétorique.

Le plus choquant est la légèreté avec laquelle ces nouvelles technologies s’imposent et l’incapacité des population et surtout des états à en comprendre les enjeux. Ce n’est pas rien, il s’agit tout de même de la possibilité d’un esclavage total. Et pour ne pas se laisser manipuler, commençons par mettre la bonne définition sur les choses : Twint n’est pas une application de paiement. Twint est un consortium entre les banques et des entreprises de technologies numériques dont Worldline et [indirectement] Blackrock, qui militent activement pour une société sans cash, pour l’E-ID, et qui veulent l’imposer au niveau de l’Union Européenne [et par extension la Suisse]. Bref, qui veulent un contrôle total sur nos vies.

Un jour ou l’autre, la confédération introduira Twint comme moyen de paiement pour les impôts, les assurance, les versements de salaires, etc… ce sera d’abord une option, puis suite à une cyberattaque ou je ne sais quoi cela deviendra obligatoire et sans même vous en être aperçu, toute votre vie sera sous surveillance de Blackrock. Est-ce ce que vous souhaitez ?

Fin, merci d’avoir lu.

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Notes: